Economie
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Faut-il encore acheter de l'engrais en 2025 ?

Introduction

La question de l’achat d’engrais en 2025 ne relève plus uniquement d’une logique agronomique, mais bien d’un arbitrage économique complexe. Face à la flambée persistante des prix, à la volatilité des marchés et à un environnement réglementaire contraint, les agriculteurs doivent composer avec de multiples facteurs pour sécuriser leurs rendements sans grever leur trésorerie. Alors, faut-il acheter ou attendre ? Voici une analyse chiffrée, structurée et orientée terrain.

1. Prix des engrais : un niveau toujours élevé

Le début de l’année 2025 confirme la tendance entamée depuis la crise énergétique de 2022 : les prix restent élevés. L’urée, principale forme d’azote utilisée, a bondi de 20 % au premier trimestre, tandis que les prix de la solution azotée oscillent entre 330 et 340 €/t, soit plus du double des niveaux de janvier 2020. Malgré une baisse par rapport au pic de 700 €/t enregistré en 2022, les prix ne retrouvent pas leurs niveaux pré-crise. Le marché reste sous tension, soutenu par le prix du gaz naturel, indispensable à la fabrication des engrais azotés.

Cette dynamique haussière touche également le DAP (phosphate diammonique) avec une augmentation de 5 %, et le MOP (chlorure de potassium) en hausse de 8 %. Ces hausses sont partiellement expliquées par une demande mondiale soutenue, notamment en provenance d’Inde et du Brésil, mais aussi par des restrictions d’exportations de plusieurs pays producteurs.

2. Des comportements d’achat plus tactiques

En France, les livraisons d’engrais azotés ont progressé de 2,8 % au cours des six premiers mois de la campagne 2024-2025, portées notamment par une hausse de 18,8 % de l’urée et de 6,6 % de l’ammonitrate. En parallèle, les livraisons de phosphate et de potasse ont connu des hausses respectives de 24,4 % et 18,3 %, en réponse à une légère détente des prix sur ces segments.

Néanmoins, au niveau européen, la consommation reste inférieure de plus de 10 % à son niveau d’avant-crise pour l’azote, et de 20 % pour les phosphates et potasses. Cette baisse reflète une prudence accrue des exploitants, qui adoptent des stratégies plus opportunistes, en différant leurs achats dans l’attente hypothétique de baisses. Pourtant, les analyses montrent que ces baisses n’interviennent réellement qu’une année sur dix, et que l’attentisme expose à des ruptures de stock ou à des achats en période de tension.

3. Des coûts de production durablement sous pression

Même si certains prix reculent ponctuellement, les fondamentaux restent tendus. Les coûts de production des engrais restent élevés, notamment à cause de la facture énergétique et du transport. À cela s’ajoute une réduction de la production européenne, avec des arrêts temporaires ou définitifs de certaines usines, ce qui limite l’offre disponible.

À la sortie de l’hiver 2025, les stocks sont faibles. La reprise saisonnière de la demande pourrait donc entraîner une remontée rapide des prix au printemps. Dans ce contexte, les agriculteurs sont incités à sécuriser leurs approvisionnements en amont, malgré les tensions sur leur trésorerie.

4. Des alternatives techniques pour réduire les volumes

Pour faire face à cette situation, l’agriculture de précision se développe comme réponse technique crédible. Les engrais à libération lente, les produits micro-encapsulés, et les outils d’aide à la décision (OAD) permettent de cibler les apports, de moduler les doses et de limiter les pertes par lessivage ou volatilisation.

L’utilisation de cartes de préconisation, de capteurs embarqués et de suivis satellitaires permet d’ajuster les apports au plus juste selon les besoins des cultures et les caractéristiques de chaque parcelle. Ces technologies représentent un investissement initial, mais permettent à moyen terme une réduction des volumes de 10 à 20 % sans baisse de rendement.

5. L’impact géopolitique sur le marché

Le marché des engrais reste très dépendant de facteurs politiques. Les sanctions commerciales contre la Russie et le Bélarus ont eu pour effet de restreindre l’offre de matières premières, en particulier l’urée. En Pologne, plus de 70 % des importations en provenance du Belarus ont été bloquées. L’Union européenne met également en place des mesures de protection de ses producteurs via des droits antidumping, ce qui maintient une pression haussière sur les prix.

Dans le même temps, plusieurs États membres subventionnent l’achat d’engrais pour préserver la compétitivité des filières agricoles. Cela alimente indirectement la demande et empêche un retour rapide à des prix bas.

6. Recommandations économiques pour 2025

Dans ce contexte incertain, la meilleure stratégie consiste à lisser ses achats dans le temps (approche échelonnée), à diversifier ses fournisseurs et à surveiller les signaux de marché (cours du gaz, taux de change, décisions politiques). Il est également conseillé d’investir dans l’agriculture de précision pour réduire la dépendance aux volumes élevés.

Acheter au bon moment reste difficile, mais des outils existent pour accompagner les décisions : indicateurs de marché, contrats à terme, groupements d’achat. Enfin, le recours à des sources locales, organiques ou issues de la méthanisation permet de compléter une stratégie plus résiliente, notamment sur le plan environnemental.

Conclusion : Acheter, oui… mais différemment

En 2025, acheter de l’engrais reste incontournable pour la grande majorité des exploitations agricoles. Mais le contexte impose de revoir les pratiques : planification rigoureuse, diversification, innovation technique, et veille stratégique. La rentabilité dépend désormais autant du bon usage de l’engrais que de son prix d’achat.

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