Diminution des phytos : quel impact sur les charges à l’hectare ?
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Introduction
Dans un contexte où la pression réglementaire et sociétale pousse à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires, les agriculteurs s’interrogent sur les conséquences économiques de cette transition. L’impact sur les charges à l’hectare est significatif, mais très variable selon les cultures, les systèmes techniques et les pratiques mises en œuvre. Cet article propose une analyse approfondie et chiffrée des effets de la réduction des traitements phytosanitaires sur les charges agricoles.
1. Des économies réelles sur les charges phytosanitaires
En grandes cultures, les dépenses moyennes en produits phytosanitaires s'élèvent à 134 €/ha pour un IFT moyen de 3,8. Passer à un système à bas intrants permet de réduire l’usage de pesticides d’environ un tiers, ce qui entraîne une économie moyenne de 34 %.
En cultures légumières, la baisse peut atteindre les mêmes proportions. En arboriculture et viticulture, les charges phytosanitaires hors herbicides varient entre 290 et 321 €/ha. La réduction des traitements y permet des économies plus modestes, autour de 16 à 30 %, selon les cas.
2. Une marge brute globalement maintenue
La baisse des intrants ne signifie pas nécessairement une baisse de rentabilité. Les fermes du réseau DEPHY ayant diminué leur IFT de 42 % maintiennent leur productivité dans 94 % des cas, et leur rentabilité dans 78 % des cas.
Les marges brutes augmentent même légèrement dans les systèmes initialement très intensifs. Une baisse de 25 à 30 % des intrants peut entraîner un gain de marge brute, grâce à la réduction des coûts sans perte de rendement significative.
3. Charges annexes et temps de travail : une vigilance nécessaire
Si les coûts des produits diminuent, certaines charges opérationnelles peuvent augmenter. La suppression des herbicides, par exemple, impose un recours plus fréquent au désherbage mécanique. Cela se traduit par une hausse du temps de travail à l’hectare de 15 à 30 %, et donc des charges de main-dœuvre et de mécanisation.
Cependant, ces charges sont souvent compensées par la baisse des achats de produits et des frais d’application. Dans certains cas, la moitié des opérations de désherbage mécanique peut être évitée sans impact sur la marge brute, notamment dans les systèmes bien adaptés.
4. Rendement : une baisse modérée, sous conditions
La réduction des pesticides entraîne rarement une chute drastique de la production. En grandes cultures, la perte de rendement est estimée entre 6 et 14 %, selon l’ampleur de la réduction et le type de culture.
Un scénario de transition vers des systèmes à bas intrants, avec une baisse de 50 % de l’usage des pesticides, entraîne une baisse de marge brute de seulement 5 %, pour une production globalement stable.
Dans les cultures spécialisées, comme la vigne ou les vergers, les pertes peuvent être plus importantes (jusqu’à 24 % en viticulture, 19 % en arboriculture), mais elles sont souvent amorties par les aides publiques et la baisse des coûts de produits.
5. Synthèse : des effets variables mais maîtrisables
L’impact de la réduction des phytosanitaires est d’autant plus positif que l’usage initial était élevé. Dans les systèmes intensifs, les gains économiques peuvent être significatifs. A contrario, dans les systèmes déjà optimisés ou spécialisés, les marges de manœuvre sont plus réduites.
Les augmentations de charges annexes (temps de travail, mécanisation) restent modérées et sont souvent contrebalancées par les économies en produits chimiques. Enfin, l’accès aux aides, la valorisation des produits à bas intrants et l’adaptation des pratiques sont les clés d’une transition rentable.
Conclusion
Réduire les traitements phytosanitaires permet de baisser les charges à l’hectare de 16 à 34 % selon les cultures, avec un impact limité sur la marge brute, voire une amélioration dans les systèmes intensifs. L’augmentation du temps de travail et des charges de mécanisation est réelle, mais maîtrisable. En adaptant les pratiques et en mobilisant les bons outils, la réduction des phytos devient un levier économique autant qu’environnemental.